Suite à une analyse des potentialités économiques de l’Afrique, Jean-Michel Severino, ancien directeur de l’Agence française de développement(AFD), et Jérémy Hadjenberg, spécialiste de la micro finance, publient en 2016 un ouvrage intitulé « Entreprenante Afrique ». Sa trame souligne à  grands traits l’attractivité économique du continent africain qui pourrait reposer sur l’immensité de ses ressources naturelles, mais également sur les opportunités d’emplois et d’auto-emploi offertes par les technologies du numérique aux jeunes créateurs.

D’importantes levées de fonds

En effet,  en 2017, les pépites Tech africaines ont levé près de 560 millions de dollars. Selon une étude du fonds d’investissement Partech  Ventures, ces fonds sont en croissance de 53% par rapport à 2016. À l’observation, le secteur connait un développement rapide en raison de l’intérêt que les jeunes ingénieurs sortis des grandes écoles accordent à l’outil numérique. Au Kenya, en Afrique du Sud, au Nigeria et au Ghana, entre autres,  des start-ups se créent dans l’agriculture, le commerce, l’informatique, l’éducation, les énergies renouvelables et  la santé.

Au Sénégal, Total et Worldwide (paiements électroniques) ont investi en 2018, 3,7 millions d’euros dans la start-up InTouch d’Omar Cissé qui commercialise un agrégateur permettant aux commerçants de recevoir des versements des nombreux services de paiement par téléphone mobile existant sur le marché. Dans le domaine de l’énergie, la start-up M-Kopa, propose d’installer  des panneaux solaires chez des particuliers moyennant un modeste montant initial, puis des micro-paiements sur téléphone mobile à l’issue desquels le client devient propriétaire. Au  Nigéria, Trade Depot  est une plate-forme mobile qui met en relation les grands fournisseurs de biens de consommation avec les petits détaillants qui écoulent leurs produits.

Selon les statistiques de la Banque mondiale, 443 incubateurs de start-ups existent  à travers le continent africain, alors qu’ils n’étaient encore qu’une dizaine au début de la décennie.  Ces laboratoires de coaching des jeunes concepteurs de projets numériques ont aidé à l’identification de nombreuses insuffisances managériales des pépites créées.  Parmi celles-ci, figurent l’amateurisme dans la gestion des start-ups qui sont avant tout des entreprises, la pression fiscale qui étouffe la croissance de l’activité et la propension  des grandes entreprises à ignorer les pépites lorsqu’il s’agit de développer leurs programmes innovants.

Former au management de projets

Pour combler ces lacunes et réduire le  taux d’échec  des jeunes promoteurs africains  de start-ups, on enregistre  un grand bouillonnement des activités de formation ces dernières années au Rwanda. Dans le cadre de l’African Green Revolution Forum 2018, il  se tient à Kigali, en septembre, une formation sur le thème « Préparation à l’investissement pour les start-ups ».  Comme bien d’autres, cette formation  a pour objectif d’aider les startupers invités à identifier leurs  faiblesses en matière de gestion financière et comptable et envisager les actions correctives appropriées. Déjà, le 24 juillet 2018, le gouvernement rwandais  signait un accord de partenariat avec la société américaine Andela. Cet accord  porte sur l’ouverture d’un centre de formation technologique panafricain à Kigali. Ici, la formation est destinée aux Rwandais ayant une expertise en développement de logiciels, programmation, informatique…avec en projet,  d’étendre la formation à toute la sous-région de l’Afrique de l’Est.

Le même élan est observé au Cameroun et au Sénégal où les pouvoirs publics s’engagent à imprimer un rythme accéléré au développement des opportunités du numérique. En partenariat avec le ministère  camerounais des PME, l’École supérieure des sciences économiques et commerciales(ESSEC) de l’Université de Douala héberge un incubateur d’entreprises qui accueille et forme des jeunes  à la gestion optimale  de leurs  projets. De plus, la Banque mondiale, à travers le programme  XL Africa, donne la possibilité aux meilleurs  promoteurs  camerounais de start-ups de bénéficier d’une formation de cinq mois ponctuée d’enseignements théoriques et pratiques  en matière de gestion d’entreprises. Selon les sources du département Trade and Competitiveness Global Practice de la Banque Mondiale, ce programme vise aussi  à mettre l’accent sur l’économie numérique croissante du continent, en explorant et en soutenant les start-ups technologiques les plus novatrices.

Au Sénégal, dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie Sénégal numérique 2025,  il est prévu l’octroi des bourses d’études  annuelles dans le domaine du numérique,  la formation à l’entreprenariat numérique et l’adoption des réformes en vue de l’amélioration de l’environnement des affaires.

Adapter l’offre à la demande et maîtriser les coûts

Dans le même ordre,  les stratégies de capacitation managériale des jeunes porteurs de projets numériques  devient une grande préoccupation dans les pays du Maghreb. En avril 2018, l’Assemblée des représentants du peuple tunisienne adopte le Start-up Act, qui prévoit la création du Collège des start-ups, procure des avantages financiers divers aux jeunes pousses et apporte une souplesse dont a besoin l’écosystème pour se développer. Ce Collège  octroie également le label « start-up » à toute société qui remplit des critères techniques et présente un projet qui met en valeur  le caractère innovant et le potentiel économique de la jeune entreprise.

Concernant le Maroc, l’accompagnement des jeunes pousses s’enracine. Des programmes de pré-incubation tel New Work Lab,  propose une formation des jeunes entrepreneurs pour les aider à développer au mieux leur business ou leur idée de start-up. Plusieurs modules se penchent sur les différentes étapes pour porter au mieux le  projet vers la réussite. Les start-upers marocains bénéficient ainsi de formations sur la gestion de projets, l’identification de clients potentiels, l’adaptation de l’offre à la vraie demande des clients et la création de prototypes à moindre coût.

En somme, grand devient le souci pour  les pays africains d’encadrer les retombées  des technologies  numériques dans un environnement marqué par le  chômage des jeunes. Afin de garantir la soutenabilité des start-ups et autres entreprises montées par les jeunes talentueux, créatifs et ambitieux, l’urgence reste de renforcer les initiatives de formation mises sur pied ici et là. Ce faisant, le taux de faillite  des projets se réduira  et les success-stories deviendront plus nombreuses, parce qu’adossées sur la maitrise du management de projets.

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