Face à l’incapacité des États africains à faire face à la forte demande des services de santé, des initiatives portées par des acteurs privés ont de plus en plus pignon sur rue.  La contribution de ces partenaires est appréciée et soutenue par les investisseurs.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la grande majorité des pays du continent africain consacrent entre 5 et 10% de leur Produit Intérieur Brut (PIB) à la santé, malgré l’engagement des dirigeants à porter ce taux à au moins 15%. La conséquence de cette situation préoccupante est que l’Afrique compte  en  moyenne 9 lits pour 10 000 habitants, contre environ 27 dans le monde.

Le privé se positionne au Maghreb

L’offre publique de soins étant  donc  insuffisante en Afrique,  les établissements privés de santé se multiplient dans l’optique de répondre convenablement aux sollicitations des patients et de rentabiliser les investissements mobilisés. Dans cet ordre, ils ciblent les secteurs les plus rémunérateurs tels l’ophtalmologie, l’orthopédie, la cancérologie, l’obstétrique et l’imagerie médicale.

En effet, en 2013, l’Afrique a enregistré un grand essor  des cliniques privées. Au Maghreb,  on en compte 120 en Tunisie et près de 150 au Maroc, deux pays qui ont  l’avantage d’offrir des soins de qualité pour un coût de 50% inférieur à une prise en charge en Europe. Ici, la tendance est soutenue par l’émergence d’une classe moyenne moderne et l’essor des pathologies non transmissibles comme le cancer, ainsi que le vieillissement de la population et l’aspiration à une meilleure prise en charge sanitaire. Avec près de 13 millions d’euros de chiffres d’affaires, l’opérateur tunisien, Amen Santé,  au centre de cette croissance, étend ses activités en Algérie, en Libye et en Mauritanie.

Spécialités  pointues : opportunités à valoriser

En Afrique subsaharienne,  le rythme de création des établissements privés de santé tient compte des faiblesses du secteur public. Au Sénégal, l’option est prise pour le développement de la chirurgie cardiaque considérée  par les observateurs comme le plus grand manque de l’Afrique de l’Ouest. Au Togo et au Cameroun, les promoteurs des cliniques de haut vol se positionnent dans les domaines assez pointus, notamment la création des centres de référence régionaux en matière d’aide à la procréation (Clinique de l’Aéroport de Douala au Cameroun et Clinique Biasa au Togo).

En effet,  l’Afrique subsaharienne compte 11% de la population mondiale, supporte 24% de la charge de morbidité et représente moins de 1% des dépenses de santé pour environ 3% du personnel médical mondial (Banque Mondiale).  Pour prendre les choses du bon côté, cet environnement de détresse pourrait conforter dans l’idée  que  le marché des soins de santé reste ouvert en Afrique et devrait attirer des porteurs de financements. Dans cette logique, l’Investment Fund for Health in Africa(2007) doté de 50 millions d’euros et l’Africa Health Fund (2009) qui bénéficie du soutien de la Fondation Bill & Melinda Gates et de plusieurs autres bailleurs de fonds,  ont injecté des sommes importantes dans la viabilisation du secteur privé de la santé en Afrique, en l’occurrence l’industrie pharmaceutique et la dialyse.

Sur un plan strictement institutionnel,  la cartographie des établissements  privées de santé héberge un nombre élevé  de centres de santé ou de GIC (Groupe d’initiative commune) Santé clandestins  mis sur pied par des promoteurs animés plus  par la recherche du  gain  que par  la dispensation des soins de santé  articulés sur la déontologie professionnelle. En conséquence, il n’existe aucune possibilité de contrôle et d’évaluation des prestations offertes  en vue  d’améliorer leurs performances et attirer d’éventuels financements.

L’accompagnement de la Banque mondiale

Pourtant,  des lignes de crédits de financement sont disponibles  dans les livres des bailleurs internationaux. Par exemple, la Société financière internationale(SFI), une filiale de la Banque mondiale, se propose de mobiliser près d’un milliard  de dollars sur une période de trois ans  pour contribuer à l’amélioration des conditions de vie des populations,  apporter des appuis financiers au secteur privé  de santé et  aider   les  États africains à  atteindre leurs objectifs. C’est sans doute le sens du prêt de 1,5 million de dollars accordé par la SFI  à  la Clinique  La Providence du Tchad pour  l’accompagner dans l’offre  des services médicaux pour lesquels les Tchadiens se rendent  régulièrement  à l’étranger.

Bien plus,  selon les conclusions d’une étude menée par l’expert français, Marc-Eric Gruenais en 2004, les établissements confessionnels de santé offrent dans certains pays africains plus de 13% de l’ensemble des lits disponibles sur leur territoire.  Quelquefois, ajoute-t-il, ce ratio pourrait atteindre 50% dans certains  pays qui réussissent à lever auprès des bailleurs  des financements de l’ordre de 10 milliards de FCFA (environ 15 300 000 euros) par an pour développer les services aux patients.

Certes,  les années  sont passées et les réalités peuvent avoir évolué. Mais, dans le fond,  il reste envisageable que l’avenir de la prise en charge des patients africains repose sur le secteur privé de santé, plus à même de s’approprier les exigences de la gouvernance managériale et de la qualité de soins  aux usagers.

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