Un peu timide au début, la présence japonaise sur le continent s’affirme chaque jour. Le Japon considère désormais l’Afrique comme une terre d’avenir.

Le pays du Soleil-Levant est assurément discret en Afrique. Il est bien loin de l’exubérance de la coopération occidentale et du trop voyant partenariat sino-africain. Mais la présence du Japon en Afrique n’en est pas moins forte. Dans « L’Aide publique au développement japonaise et l’Afrique : vers un partenariat fructueux ? », l’auteur, Julien Kita, affirme : « Un des aspects les plus tangibles de la politique étrangère nippone vis-à-vis du continent est son aide publique au développement (APD). Si seulement 2,2% de l’APD japonaise est destinée au continent africain en 1970, sa part atteint 15,3% en 1989. »

Une coopération tout en évolution

En 2016, l’Afrique représente 28% des dons, 15% de la coopération technique et 4% des prêts concessionnels, soulignent le professeur Akihiko Tanaka (Université de Tokyo) et Charles Boamah (Banque africaine de développement), dans un article publié dans « Le Monde » (« Le Japon, un modèle de coopération avec l’Afrique ? »). Selon un engagement pris en août 2016, le Japon va consacrer 30 milliards $US jusqu’en 2018 pour des investissements en Afrique. Cette résolution a été prise au cours de la sixième édition de la TICAD (Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique), organisée pour la première fois en Afrique à Nairobi au Kenya. Deux tiers de ces investissements sont réalisés par le secteur privé. Depuis cette date se tient aussi un Forum économique public-privé nippo-africain.

Les entreprises japonaises préféraient encore il n’y a pas très longtemps uniquement les marchés à forte rentabilité, mais la situation commence à changer. « Jusqu’ici, le secteur privé n’avait pas suivi. Mais, désormais, les entreprises japonaises s’intéressent sérieusement à l’Afrique, analyse M. Kataoka Sadaharu, président de l’Institut de stratégie internationale à l’université Waseda (Tokyo) et spécialiste de la politique du Japon en Afrique. Les multinationales ouvrent des succursales (…) L’Afrique représentait 3% du total des investissements du Japon en 2011, contre moins de 1% auparavant. C’est un progrès, mais beaucoup reste à faire. »

Le Japon aborde ses relations avec l’Afrique sous l’angle du business sans aucun doute, mais pas seulement. L’empire du Soleil-Levant dit vouloir transmettre à l’Afrique les clés et les astuces de sa propre réussite. Pas uniquement à travers la TICAD, conférence nippo-africaine créée en 1993 avec l’ambition d’aider à impulser le développement de l’Afrique. Pas seulement par l’entreprise de l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA), par les investissements, l’aide publique ou le commerce (24 milliards de dollars en 2015).

Transmettre à l’Afrique les clés de la réussite

Mais aussi par un mental différent, ce que les Japonais appellent le Kaizen. Associé à la réussite du constructeur automobile Toyota, le Kaizen est une philosophie comportementale qui encourage à développer le sens de l’initiative et à se départir de l’esprit de l’exécutant. Par ailleurs, le Japon promeut l’idée de l’appropriation (self-help), qui repose sur les efforts personnels de celui qui reçoit.  Ambassadeur pour le Japon de la Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l’Afrique (TICAD), Yoshifumi Okamura affirme : « Nous pensons qu’il n’est pas juste de seulement donner. Nous sommes plus exigeants. Si vous êtes prêt à fournir d’importants efforts pour vous aider vous-même, alors nous vous aidons. Mais si vous vous asseyez en attendant que l’argent tombe du ciel, alors nous n’aidons pas. »

Le Japon considère désormais l’Afrique comme une terre d’avenir. Pendant longtemps, il a parcimonieusement choisi ses partenaires, s’abstenant de relations avec les pays africains « mal notés ». À preuve, entre 2011 et 2015, 70% de ses exportations vont prioritairement vers l’Afrique du Sud, l’Egypte, le Kenya, le Liberia et Nigeria. Et ses importations dans la même période étaient essentiellement issues de trois pays : Afrique du Sud (42,8%), Nigeria (24,5%) et Algérie (8%). Et aussi, ce n’est qu’en 2001 qu’un chef de gouvernement japonais en exercice a foulé le sol africain.

Le Premier ministre Shinzo Abe a défini un nouveau cap des relations entre son pays et l’Afrique. Il veut indéniablement en faire un partenaire économique au regard de son potentiel, mais aussi un allié stratégique pour son positionnement dans le concert des nations, principalement dans sa rivalité avec la Chine et l’Inde.

Parfait N. Siki

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