Selon l’Organisation internationale du Travail (OIT), la discrimination au travail constitue non seulement un abus des principes et des droits fondamentaux au travail, mais elle a aussi un coût social et économique énorme pour la société. Des études démontrent en effet qu’éliminer la discrimination augmente le revenu national des pays et la productivité, la capacité à innover et la rentabilité des entreprises.
L’OIT définit la discrimination comme « toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l’opinion politique, l’ascendance nationale ou l’origine sociale », qui altère l’égalité des chances ou de traitement en matière d’emploi, y compris en matière de conditions de travail et de formation.
Un phénomène aux facettes multiples
Les experts estiment que la discrimination au travail est un phénomène complexe qui se retrouve dans toutes les sociétés et dans tous les secteurs. Elle se manifeste de diverses manières. On parle ainsi de la discrimination dans l’embauche et les opportunités d’embauche, les promotions, les relations entre employés et entre employés et employeur, le type de travail effectué ou le salaire.
Par ailleurs, soulignent les spécialistes, l’emploi effectué contribue à perpétuer la discrimination : les femmes, les minorités ethniques, les travailleurs migrants auxquels certains types d’emplois sont traditionnellement réservés.
Un sondage effectué en France par le Défenseur des droits et l’Organisation internationale du travail, place en tête des critères d’exclusion, l’âge et le sexe – dans 15% des cas –, suivis par l’origine (8%), la grossesse et la maternité (7%), le handicap ou l’état de santé (6%), et la religion (2%).
Par ailleurs, « la moitié des femmes de 18 à 44 ans rapportent par exemple avoir été discriminées ».
Chez les hommes, « 48% des sondés vus comme originaires d’un pays hors Europe assurent avoir été discriminés, contre 24% de ceux perçus comme blancs ».
Une entrave au développement
L’OIT, qui a fait de l’élimination de la discrimination au travail l’un de ses objectifs principaux, observe ainsi que « la moitié de la main d’œuvre mondiale est constituée de travailleurs pauvres qui sont excles socialement et économiquement de la mondialisation ». Par ailleurs, soutient-elle, « non seulement cette discrimination est une atteinte à l’un des principaux droits de l’homme mais elle a également des conséquences sociales et économiques ».
Les experts de l’OIT estiment que « la discrimination entrave le développement car elle gaspille le talent humain nécessaire au progrès économique et elle accentue les tensions et les inégalités sociales ». Le coût de ces discriminations est jugé énorme par cette institution des Nations unies qui a fait de la lutte contre ce phénomène sa raison d’être.
Pour sa part, Jean Pisani-Ferry, commissaire à France Stratégie, dans un Rapport sur le coût économique des discriminations (septembre 2016) estime que « cantonner certains (et surtout certaines) à des positions secondes contrevient au principe d’égalité et cause de la souffrance ». S’agissant de leur impact sur l’économie, il affirme que « les discriminations sont économiquement pénalisantes, que leur coût pour la collectivité est élevé, et donc que leur élimination induirait, à terme, un gain substantiel en croissance et en revenu ».
Eliminer les discriminations pour améliorer la productivité
Briser le tabou de la discrimination en milieu de travail pour plus de productivité s’impose ainsi comme une nécessité. Ce à quoi s’attèle l’OIT qui dispose à cet effet d’un certain nombre d’instruments juridiques.
Pour sa part, au lieu de s’attarder sur le calcul de ce que les discriminations font perdre à l’économie, France Stratégie préfère prendre le problème par l’autre bout, à savoir ce que leur élimination pourrait faire gagner en productivité.
Jean Pisani-Ferry cite des travaux américains qui montrent que « l’amélioration de l’accès des femmes et des Noirs aux postes essentiellement occupés par des hommes blancs serait à l’origine de 15% à 20% de la croissance des États-Unis depuis les années soixante ».
Bien qu’il soit difficile de mesurer avec précision l’impact des discriminations sur la productivité, les experts sont d’avis que leur élimination est de nature à améliorer la productivité. C’est ce qui explique la mobilisation de la communauté internationale pour réduire à sa plus simple expression ce phénomène.
Marc OMBOUI